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Critique : « Dark Shadows » de Tim Burton

affiche de Dark ShadowsCinéaste génial doté d’un univers à part, célébré en ce moment à la Cinémathèque Française, Tim Burton nous a offert des chefs d’oeuvre inoubliables au début de sa carrière (« Edward aux Mains d’argent », « Ed Wood »…), avant de commencer à nous décevoir dans les années 2000 avec des films hollywoodiens ratés comme son remake de la Planète des singes ou encore, le dernier en date, « Alice au Pays des Merveilles » (néanmoins l’un de ses plus gros scores au box-office mondial). On avait donc des raisons de douter de la qualité de son dernier opus, « Dark Shadows« , l’adaptation d’un soap opéra américain à succès diffusé sur ABC à la fin des années 60.

Une série dont lui et Johnny Depp, son acteur fétiche avec qui il collabore ici pour la huitième fois, sont tous deux des fans. Au final, cette adaptation offre à Tim Burton le terrain de jeu idéal pour faire ce qu’il fait de mieux : mêler le gothique et le comique dans une ambiance à la fois sombre et colorée, effrayante et loufoque.

Johnny Depp en Barnabas Collins dans Dark Shadows

Johnny Depp y incarne Barnabas Collins, héritier d’une famille de colons ayant quitté l’Angleterre pour fonder une ville dans le Maine à la fin du 18ème siècle. Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’au jour où le jeune et beau notable éconduit sa servante, Angélique Bouchard (Eva Green), pour une plus classieuse donzelle portant le doux prénom de Josette (Bella Heathcote). C’était sans savoir que la soubrette était aussi sorcière… Folle de rage, la diabolique Angélique envoie sa rivale se jeter du haut d’une falaise et maudit son amant en le transformant en vampire, avant de le faire enterrer vivant par les villageois. Deux siècles plus tard, Barnabas est sorti par accident de son tombeau et revient dans son manoir pour aider ses descendants – une famille ruinée et un peu dégénérée – à remonter la pente que les Collins n’ont cessé de dévaler depuis des lustres. La matriarche Elizabeth (Michelle Pfeiffer) tente tant bien que mal de tenir les rênes de sa famille, qui compte sa fille, une ado un peu rebelle aux jupes courtes que Barnabas prend pour une catin (Chloë Moretz), un frère pique-assiette (Jonny Lee Miller), et son fils qui prétend communiquer avec sa mère disparue en mer. Dans ce manoir vit aussi une psychanalyste alcoolique (Helena Bonham Carter) et arrive une mystérieuse gouvernante, Victoria Winters, qui ressemble trait pour trait à la Josette de Barnabas.

Jonny Lee Miller et Helena Bonham Carter dans Dark Shadows

La rencontre entre ce vampire aux manières d’une autre époque et cette famille vivant dans le temps de la glorieuse société de consommation est évidemment propice à une succession de gags plutôt réussis et des dialogues souvent drôles. Dans « Dark Shadows », Tim Burton opère aussi une sorte de synthèse de son cinéma (on pourra facilement lui reprocher de faire du recyclage) avec, comme (presque) toujours, un Johnny Depp grimé, un manoir maudit hanté par des fantômes comme dans « Beetlejuice » et une foule en colère comme dans « Edward aux Mains d’argent », une histoire de vengeance sur fond de malédiction comme dans « Sweeney Todd »… Bref, Tim Burton se cite et multiplie les clins d’oeil à ses propres oeuvres en retrouvant ses thèmes familiers – famille forcément dysfonctionnelle avec un père absent, société abrutie par le consumérisme… – tout en convoquant les éléments fantastiques qui lui sont chers.

Tout n’est pas pour autant réussi. Le scénario est la principale faiblesse du film : assez convenu sans véritable enjeu dramatique, il ne parvient malheureusement pas à faire exister assez ses personnages secondaires pourtant intéressants.  Néanmoins, Tim Burton parvient à nous emporter dans cette aventure grâce à son sens de la mise en scène (impeccable), aidé par des décors gothiques somptueux et des effets visuels très impressionnants. Il nous offre également des scènes complètement barrées et psychédéliques dont il a le secret, comme cette séquence jubilatoire de sexe acrobatique entre Angélique et Barnabas, ou encore leur affrontement final assez surpenant. Le casting prestigieux qu’il s’est offert est dans l’ensemble très convaincant : mention spéciale à Eva Green qui surprend plus que Johnny Depp en mode méga bitch blonde sexy en diable, à Michelle Pfeiffer qu’on est content de retrouver, et à Helena Bonham Carter, toujours aussi folle.

Eva Green en Angélique Bouchard dans Dark Shadows

« Dark Shadows » est donc un divertissement très plaisant dans l’ensemble, bien que non exempt de défauts, qui a le mérite de nous faire enfin retrouver l’univers sombre et fou de Tim Burton. Un monde où cohabitent noirceur et fantaisie. Un plutôt bon cru… Espérons qu’il continue sur cette voie.

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